Béatrice Cyr : Mener sa vie tambour battant
Cet article s’inscrit dans la collection « Relève en génie ».
Par Pascale Guéricolas, photos : Luis Médina et Didier Bicep
À 15 ans, certains excellent dans la manipulation de manettes de jeux vidéo ou s’emballent pour la dernière vidéo sur TikTok. Béatrice Cyr, elle, servait avec enthousiasme des légumes aux clients du kiosque de son quartier à Trois-Rivières. Au point qu’à 17 ans, nouvellement promue coordonnatrice, elle reçoit des mains de son patron les clés du camion de livraison, alors qu’elle vient tout juste d’obtenir son permis. Quatre ans plus tard, désormais dirigeante de l’équipe des livreurs et des autres membres du personnel, la jeune fille achète un bar laitier avec le propriétaire des kiosques et plusieurs collègues de travail. Quel rapport avec ses études en génie à Polytechnique Montréal, peut-on se demander ? Une partie de la réponse vient de l’aplomb qu’elle démontre lors de son premier projet au baccalauréat. Les membres de son équipe doivent mettre au point un oxymètre qui prend le pouls au bout du doigt des patients. « En me fondant sur mes expériences de travail antérieures, j’ai pu guider mon équipe dans ce projet et distribuer les tâches, même si nous ne disposions pas des connaissances théoriques sur le sujet », confie la jeune femme.
J’ai adoré étudier les éoliennes. C’est tellement beau et énorme ! D’autre part, j’ai vraiment envie de jouer un rôle pour l’avenir de la planète.
— Béatrice Cyr — étudiante en génie physique à Polytechnique Montréal
Cet exemple illustre bien la méthode de travail très efficace de cette étudiante, qui cumule une moyenne de 3,9 sur 4 au baccalauréat en génie physique. Douée pour la résolution de problèmes mathématiques, elle se détend en apprenant à une collègue de travail. Ou encore en clavardant avec des jeunes filles du secondaire ou du cégep qui s’interrogent sur la formation en génie dans le cadre du programme GéniElles, mis en place par Polytechnique Montréal. Elle est aussi directrice du comité à l’éducation en génie physique. Sous sa gouverne, un sondage réalisé auprès des étudiantes et des étudiants a permis, par exemple, de bonifier le contenu d’un cours d’optique afin de mieux outiller les futurs ingénieurs physiciens et ingénieures physiciennes en optique de Fourier et en photonique.
« Les gens ont tendance à croire que les personnes qui travaillent en ingénierie sont des êtres essentiellement cérébraux, remarque l’étudiante. Il faut pourtant que nos autres activités nous permettent de nous développer autrement, sinon on va virer fous ! » Elle, qui adorait inventer des objets pour se simplifier la vie lorsqu’elle était enfant, a découvert avec bonheur la physique au cégep, une matière révélatrice du monde invisible grâce à la mécanique quantique, ou encore du monde des possibles par le biais des théories sur la téléportation.
En route vers la maîtrise
Un projet universitaire portant sur l’efficacité des énergies renouvelables lui a ouvert de nouvelles perspectives. « J’ai adoré étudier les éoliennes, déclare Béatrice Cyr. C’est tellement beau et énorme ! D’autre part, j’ai vraiment envie de jouer un rôle pour l’avenir de la planète. » Très motivée, la jeune étudiante met les bouchées doubles : à la fin de son baccalauréat, elle entreprendra, dès l’hiver prochain, une maîtrise en génie énergétique, une façon pour cette adepte du compost et du covoiturage d’appliquer les notions théoriques apprises au premier cycle. Le stage en sciences des données qu’elle effectue cet été à Hydro-Québec devrait aussi lui donner des outils de programmation pour mieux lier météorologie et changements climatiques.
La passion de Béatrice Cyr ne se limite pas aux modèles mathématiques. À la recherche de modèles féminins en génie, elle trouve très enrichissantes ses discussions sur ses choix de formation avec une ingénieure physicienne qui participe au programme de mentorat de l’Ordre. Elle se sent en outre honorée d’avoir reçu la bourse de l’Avenir des mains de Kathy Baig. « Ces femmes-là m’impressionnent beaucoup et me motivent à me dépasser, souligne la jeune femme. Avant le cégep, j’ignorais totalement comment on pouvait faire carrière en ingénierie, car personne de mon entourage ne travaille dans ce domaine. » La jeune étudiante sait déjà qu’elle terminera sa maîtrise en décembre 2023. Sa future carrière l’amènera fort probablement du côté des énergies renouvelables pour mieux protéger la Terre. Et peut-être que le bar laitier de sa région natale, la Mauricie, fera encore partie de sa vie.
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