Travailler avec la Génération Z

Plongé dans la réalité des jeunes de la génération du millénaire, Charles Beauchemin, ing., supervise la création de jeux vidéo en utilisant les forces et les atouts de cette génération.

Cet article s’inscrit dans la collection « ACCOMPLIR ».
Par Pascale Guéricolas, journaliste.


Flexibilité, c’est la caractéristique qui revient le plus dans la bouche de l’ingénieur Charles Beauchemin lorsqu’il parle de ses relations de travail avec la génération Z : flexibilité dans les horaires de travail, flexibilité concernant les projets accomplis au sein des équipes, flexibilité dans les rapports hiérarchiques.

 

« Il n’est pas rare que des diplômés de l’université, tout juste embauchés, nous fassent part de leur envie de devenir gestionnaires, raconte l’ingénieur en génie électrique. On prend alors le temps de faire un plan avec ces employés pour leur donner les moyens d’atteindre leurs objectifs de manière réaliste. »

Directeur technique chez Behaviour Interactive, Charles Beauchemin fréquente des jeunes de cette tranche d’âge depuis des années dans cette entreprise de création de jeux vidéo qui compte plus de 1300 personnes principalement basées à Montréal et possède des bureaux à Toronto, à Seattle, à Rotterdam et au Royaume-Uni. Il apprécie leur capacité à prendre en main leur plan de carrière et à se projeter dans l’avenir de l’industrie. C’est pour- quoi il rencontre régulièrement les membres des différentes équipes pour parler de leurs attentes, en privilégiant une approche très directe. L’entreprise ayant opté pour une structure horizontale comportant peu de paliers de gestion, chacune et chacun a droit à l’erreur pour reprendre rapidement la bonne direction. De la même façon, Charles Beauchemin s’assure de personnaliser l’intérêt des mandats auxquels les membres des équipes répondent. En discutant de façon formelle ou non avec les uns et les autres, le gestionnaire en apprend davantage sur leurs champs d’intérêt ; il recueille ainsi de l’information qui sera utile au moment de leur assigner des projets correspondant à leurs ambitions.

 

« Il faut comprendre les individus avec lesquels on travaille et tirer parti de leurs caractéristiques pour mieux avancer. C’est important de prendre en compte leur avis lorsqu’on choisit une méthodologie pour les projets, sans rester ancré dans de vieux processus dépassés. »

CHARLES BEAUCHEMIN, ING., DIRECTEUR TECHNIQUE CHEZ BEHAVIOUR INTERACTIVE

 

L’équilibre avant tout

Étant donné que cette génération a l’embarras du choix quant aux perspectives d’emploi et que le salaire ne constitue pas sa priorité, Behaviour Interactive met le paquet pour ce qui est de l’organisation du travail. Même s’il existe certains incitatifs pour travailler au bureau comme les petits-déjeuners et les lunchs gratuits, un environnement agréable et des cinq-à-sept réguliers, le télé- travail reste accessible à 100 %. Ainsi, Charles Beauchemin annonce toujours les réunions au moins une semaine à l’avance, et se tient à l’affût des besoins particuliers du personnel, qui accorde une grande importance à l’équilibre entre vie professionnelle et vie personnelle. Si une personne doit s’absenter pour un rendez-vous, le reste de l’équipe en est informée rapidement pour ne pas perturber le projet. Même chose pour celles et ceux qui tiennent à travailler quatre jours par semaine ou qui prennent congé quelques mois pour retourner aux études.

Charles Beauchemin le reconnaît volontiers, « il faut comprendre les individus avec lesquels on travaille et tirer parti de leurs caractéristiques pour mieux avancer. Les jeunes sortent de l’école avec de très bons outils, et ils sont aussi très au fait des derniers développements logiciels, explique-t-il. C’est important de prendre en compte leur avis lorsqu’on choisit une méthodologie pour les projets, sans rester ancré dans de vieux processus dépassés. »

 

S’ouvrir aux autres

Ce qui distingue la génération Z ne se limite pas à la technologie. Le désir de transparence, l’ouverture aux autres, la sensibilité aux diversités, la capacité à s’exprimer sur des sujets sensibles font souvent partie des valeurs phares des millénariales et millénariaux, et Behaviour Interactive tient à les mettre à profit. Ainsi, une équipe de travail, dont le client se trouve à Chicago, porte actuellement une attention particulière aux dispositifs d’un jeu capable de répondre aux besoins des personnes ayant des difficultés de vision ou d’audition. Une amélioration qui rendra le produit plus accessible.

Conscient de l’importance des ingénieurs et ingénieures en programmation et de tous les professionnels et professionnelles qui conçoivent les jeux vendus ensuite par l’entreprise, Charles Beauchemin se dit prêt à considérer toute demande émanant du personnel. « Nous avons besoin de ces gens-là, c’est à nous de nous adapter et de faire des concessions », indique-t-il. Cette ouverture permet peut-être à Behaviour Interactive d’afficher un taux de rétention enviable au sein d’une industrie où on s’arrache les meilleurs éléments.

 

Les jeunes de la génération du millénaire se dévoilent

Les entreprises découvrent depuis quelques années que leurs employées et employés nés après 1997, souvent désignés par l’appellation génération Z ou millénariales et millénariaux, entretiennent un autre rapport au travail et à la hiérarchie.

Normal, ces diplômées et diplômés ont toujours connu le plein emploi et vivent même une période sans précédent de pénurie de main-d’œuvre qui facilite le changement rapide d’employeur et la négociation.

Un sondage Angus Reid, effectué à la fin d’avril pour le compte du site Indeed Canada, donne quelques pistes sur la manière de s’attirer les bonnes grâces de ce groupe d’âge. En premier lieu, il semble que l’équilibre entre la vie professionnelle et la vie personnelle arrive en tête des raisons des millénariales et des millénariaux pour demeurer fidèles à l’entreprise ; 76 % privilégient cette valeur, bien avant un salaire plus élevé.

 

Être flexible

Plus de la moitié des personnes interrogées considèrent d’ailleurs que des horaires de travail flexibles, les avantages sociaux et les congés maladie payés constituent des facteurs attrayants pour rester dans l’entreprise. La recherche du bien-être au travail, ainsi que la capacité de l’employeur à faire preuve de souplesse en matière d’horaire constituent des points importants pour la génération Z. Plus des deux tiers des travailleuses et travailleurs sondés dénoncent d’ailleurs les heures supplémentaires non payées.

La transparence de l’employeur, notamment en ce qui concerne le salaire, fait aussi partie des points que surveillent les millénariales et les millénariaux à la recherche d’un emploi. Voilà pourquoi les annonces de postes ne contenant pas cette information sont moins considérées. La génération Z mise aussi sur l’écoute et la proactivité de l’entreprise. Presque une personne interrogée sur deux indique en effet vouloir démissionner si on ne répond pas à ses demandes.

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