, 13 septembre 2022

Sophie Larivière-Mantha, ing., MBA : poursuivre sur notre excellente lancée

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En cinquième secondaire, Sophie Larivière-Mantha participe à une expo-sciences et présente le distributeur automatique de nourriture pour animaux qu’elle a construit. Cette expérience la conduira à faire une technique de génie électrique, profil instrumentation, au Cégep du Vieux-Montréal, puis à devenir ingénieure après l’obtention d’un baccalauréat en génie de la production automatisée de l’ÉTS.

Cet article s’inscrit dans la collection « entrevue ».
Par Sandra Etchenda, réd. a.
Photos : Luis Medina et Didier Bicep


Douze ans après l’obtention de son diplôme en génie, Sophie Larivière-Mantha est élue présidente de l’Ordre des ingénieurs du Québec. Plan l’a rencontrée afin de savoir comment elle compte orienter son mandat de deux ans à la présidence de l’Ordre.

Pourquoi vous êtes-vous engagée au sein du Conseil d’administration (CA) de l’Ordre ?

Je me suis engagée deux fois dans le Conseil d’admi­nistration de l’Ordre. J’ai fait un premier mandat de 2015 à 2018 et, après la naissance de mes deux fils, je suis revenue pour un deuxième mandat en 2020.

J’ai décidé de m’impliquer en me présentant au CA de l’Ordre en 2015 pour plusieurs raisons. La Commission d’enquête sur l’octroi et la gestion des contrats publics dans l’industrie de la construction (commis­sion Charbonneau) venait de se terminer, il y avait eu également l’Assemblée générale extraordinaire… Tout cela montrait qu’il y avait des défis importants à l’Ordre. Au lieu d’être uniquement commentatrice, j’ai décidé d’agir en me présentant au CA. Je voulais aider mon ordre professionnel à trouver des solutions aux enjeux auxquels il devait faire face, comme ceux relatifs à la Loi sur les ingénieurs, aux assurances obligatoires et à la cotisation annuelle.

Ces années comme membre du CA de l’Ordre m’ont permis d’en apprendre beaucoup, notamment sur la gouvernance et les audits. J’ai adoré travailler avec le Conseil d’administration pour régler les problèmes que l’Ordre avait à l’époque. C’était la première fois que j’étais membre d’un conseil d’administration professionnel.

En 2016, la mise sous administration de l’Ordre a donné les coudées franches au CA. Les membres du CA se sont rapidement mis à chercher des solutions. L’administratrice et les administrateurs désignés étaient vraiment très dévoués à leur mandat. Nous avons tous et toutes misé sur la collaboration.

Pourquoi avez-vous décidé de briguer la présidence de l’Ordre ?

Dès le mois de novembre 2021, j’ai annoncé aux membres du Conseil d’administration mon intention de me présenter aux élections pour la présidence de l’Ordre. Je leur ai alors exposé clairement mes objectifs. J’ai fait le choix de me présenter à la présidence parce que je veux poursuivre le travail entamé depuis 2016 par les membres du Conseil d’administration et la per­manence afin que l’Ordre soit LA référence parmi les ordres professionnels. Trois dossiers me tiennent parti­culièrement à cœur et je compte les faire avancer tout au long de ma présidence : le développement durable, la surveillance des travaux et la diversité dans le monde du génie, particulièrement la présence des femmes.

Trois grandes priorités

Le développement durable – Pour moi, l’ingénierie est une solution pour lutter contre les changements climatiques et pour aider à réduire les gaz à effet de serre (GES). Il est important que les ingénieures et ingénieurs se sentent concernés par les enjeux liés au développement durable, et que l’Ordre continue à en parler et à accomplir des actions concrètes en faveur de ce développement. Cela passe, par exemple, par la modification du Code de déontologie des ingénieurs pour permettre à l’Ordre d’être davantage en phase avec ces enjeux. Je veux que le public sache qu’en matière de développement durable, l’ingénierie fait partie de la solution.

La surveillance des travaux – Il revient aux membres de l’Ordre de surveiller les travaux d’ingénierie afin que la construction soit fidèle à la conception. Selon un sondage réalisé auprès du grand public en 2020 par Ipsos pour l’Ordre des ingénieurs du Québec, plus de 85 % des Québécois et Québécoises se disent en faveur de la surveillance obligatoire des travaux. L’Ordre veut faire davantage de prévention pour s’assurer que lorsque des travaux sont faits, ils sont bien faits.

La diversité dans le monde du génie – Le volet de la présence des femmes en génie m’interpelle au premier titre. Plus il y a de la diversité dans la profession, plus on peut apporter des solutions intéressantes aux dif­férents problèmes qui se présentent, aux questions qui sont posées. Évidemment, j’adhère à 100 % à l’ini­tiative 30 en 30 visant à ce qu’il y ait au moins 30 % de femmes en génie d’ici 2030. Cela fait des années que j’interviens dans les écoles afin de motiver les jeunes à choisir les sciences. J’ai fait du bénévolat au sein de l’Ordre, notamment en participant aux Midis du génie afin que nos jeunes, en particulier les filles, choisissent le génie. C’est la continuité de ce que je fais depuis des années. En plus de faire plus de place aux femmes, il est important que le monde du génie s’ouvre également davantage à la diversité.

Des modèles féminins

Vous êtes la 3e femme à occuper le poste de présidente de l’Ordre en 10 ans. Qu’est-ce que ça vous dit de la place des femmes dans la profession aujourd’hui ?

Le fait que trois femmes ont été présidentes de l’Ordre depuis 10 ans alors qu’il n’y en avait eu que deux en près de 90 ans montre bien que les efforts pour faire plus de place aux femmes dans la profession amorcés depuis quelques années commencent à porter leurs fruits. Je crois que cela peut motiver des jeunes femmes à choisir le génie pour y faire une carrière épanouissante.

La nomination de Maud Cohen à la direction générale de Polytechnique Montréal s’inscrit aussi dans cette mouvance. Cette ingénieure et ancienne présidente de l’Ordre est la première femme à occuper ce prestigieux poste depuis près de 150 ans!

Les filles qui choisiront le génie ont la chance d’avoir plusieurs modèles féminins inspirants dans la profes­sion. Je n’en démords pas : c’est vraiment le résultat de nombreuses années de travail, notamment celui de l’Ordre, pour promouvoir la place des femmes en génie et encourager les initiatives en ce sens.

Une présidente accessible

Comment envisagez-vous votre présidence ? Comptez-vous l’inscrire dans la continuité de celle de votre prédécesseure ?

Je m’inscris totalement dans la continuité de la prési­dence de Kathy Baig. J’étais au Conseil d’administra­tion, donc partie prenante des orientations qui ont été choisies lors de ses mandats. Même durant les deux ans où je n’étais pas membre du CA de l’Ordre, j’ai quand même participé à des groupes de travail, entre autres celui qui vise à modifier le Code de déontologie des ingénieurs, afin que le volet sur le développement durable y soit inscrit.

Même si je suis dans la continuité de Kathy Baig, je pense cependant que je ne mènerai pas les dossiers de la même manière qu’elle, tout simplement parce que nous avons toutes les deux des personnalités diffé­rentes. Ce qui compte, c’est que nous avons les mêmes objectifs, qui découlent des orientations du CA. C’est certainement dans la réalisation de ces objectifs que je pourrai apporter ma couleur. Je tiens aussi à continuer à participer aux activités destinées aux jeunes, comme les ateliers de construction d’abris pour les abeilles, les conférences-midi du génie, etc., pour parler de notre profession. Lors de la Tournée de la présidente, je sou­haite par exemple en profiter pour visiter des écoles afin de valoriser la profession.

Qu’aimeriez-vous que le public, les membres et le personnel de l’Ordre retiennent de votre présidence ?

Durant mon mandat, je souhaite accomplir des actions pour que le public se sente en sécurité. Bien entendu, cela ne dépend pas que de moi. Lorsque j’aurai terminé mon mandat, j’aimerais que les gens se souviennent que l’Ordre était là pour eux et que ce que nous avons accompli a servi le public.

Je souhaite également que les membres se sentent bien soutenus dans leur pratique, grâce notamment aux outils mis à leur disposition. Bien que nous ne soyons pas une association, j’entends que l’Ordre continue d’aider les membres dans leur profession, en particulier en matière de prévention. L’expérience client est impor­tante ; et lorsque les membres s’adressent à l’Ordre, nous devons nous assurer de leur offrir un service de grande qualité, cela fait partie de nos engagements.

En ce qui concerne le personnel de l’Ordre, je souhaite être une présidente accessible, une véritable collègue pour chaque employée et chaque employé de l’organi­sation. Comme nous passons plusieurs heures par jour à travailler ensemble, j’entends tisser de bonnes rela­tions avec mes collègues et réussir à les mobiliser pour atteindre nos objectifs organisationnels.

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Qui est l’ingénieure Sophie Larivière-Mantha ?

  • Elle est titulaire d’un diplôme de l’ÉTS depuis 2010, en génie de la production automatisée, concentration en technologie de la santé.
  • À 28 ans, elle devient gestionnaire dans le milieu biomédical. Depuis lors, elle a encadré des équipes travaillant dans le système de santé québécois.
  • De 2015 à 2018, elle est pour la première fois membre du CA de l’Ordre.
  • Entre 2018 et 2020, elle donne naissance à deux enfants, et suspend sa participation au CA de l’Ordre.
  • En 2020, elle réintègre le CA de l’Ordre ainsi que la présidence du Comité d’audit.
  • Le 17 juin 2022, elle est élue par acclamation présidente de l’Ordre des ingénieurs du Québec et devient ainsi la 5e ingénieure à occuper ce poste.
  • Elle a pour modèle professionnel sa mère qui, tout en éduquant ses enfants, est retournée aux études après l’âge de 30 ans et a travaillé dans le milieu de la maintenance industrielle.

 

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