, 3 mai 2022

Geneviève Campeau, ing. : Penser circulation

Prévoir le phasage des travaux et le maintien de la mobilité est un véritable casse-tête, et c’est l’expertise de l’ingénieure.

Cet article s’inscrit dans la collection « Génie à la une ».
Par Valérie Levée, photos : Luis Médina et Didider Bicep


La réfection majeure du tunnel Louis-Hippolyte-La Fontaine s’échelonnera sur plusieurs années. Le maintien de la circulation est un défi de taille dans ce projet, qui exige de mettre en place une cascade de déviations et de voies temporaires pour y arriver.

Directrice de projets spéciaux chez Intervia, Geneviève Campeau est responsable du phasage de la construction, de l’élaboration des plans de gestion de la circulation ainsi que de la conception, construction et mise en service des structures temporaires de circulation. Son défi est de réduire les entraves à la circulation tout en laissant aux entreprises de construction des plages horaires et l’espace nécessaires pour mener les travaux, le tout de façon sécuritaire pour le public et les travailleurs et travailleuses. « Il faut que les véhicules circulent, mais il faut aussi que ce soit fonctionnel pour l’entrepreneur, indique-t-elle. Il y a un équilibre à trouver entre les besoins du public et ceux du constructeur. »

Résoudre le casse-tête et communiquer les solutions

Le principal rôle de Geneviève Campeau est de trouver les meilleurs scénarios de mobilité et les mesures d’atténuation optimales pour limiter les perturbations causées par les travaux. « Avant de couper les voies pour donner des aires de travail aux équipes de construction, j’essaie toujours de maintenir la capacité routière en donnant accès à des bretelles temporaires, en créant plus de voies sur l’autoroute, en planifiant des travaux la fin de semaine », dit-elle. Lorsque ce n’est pas possible, elle déploie des mesures de mitigation en prévoyant des voies de contournement, une reprogrammation des feux de circulation ou une fine coordination avec tous les partenaires, et en offrant des solutions, dont l’accessibilité à un service de transport collectif. « Par exemple, si on ferme le tunnel dans une direction la fin de semaine, on reporte naturellement le trafic sur le pont Jacques-Cartier, et il faut déployer des effectifs policiers pour qu’ils puissent atténuer l’impact sur les feux de circulation, précise Geneviève Campeau. Il faut aussi ajuster la configuration des voies sur le pont Jacques-Cartier, prévoir des équipes de remorquage additionnelles et s’assurer que les ambulances et les véhicules des services de sécurité incendie peuvent circuler. »

J’ai travaillé dans le domaine de la planification des transports, de la conception en génie routier, de la surveillance de travaux […]. C’est ce qui m’a donné une vision multidisciplinaire.

Geneviève Campeau, ing. — Intervia

Ce travail d’optimisation implique de savoir communiquer avec les partenaires du projet ainsi qu’avec les élus municipaux et la population. L’ingénieure en mobilité se doit d’être à l’écoute des constructeurs pour tenter de trouver des solutions qui répondent à leurs besoins en tenant compte des préoccupations des usagers afin de favoriser l’acceptabilité sociale du projet.

Sur la route de la gestion de la mobilité

La gestion de la mobilité est un travail complexe et exigeant qui demande un suivi constant sur le chantier, y compris le soir et les fins de semaine, et une disponibilité à toute heure en cas d’urgence. « Il n’y a pas beaucoup de professionnels et de professionnelles qui persévèrent sous ces contraintes. Pour moi, c’est tout un défi parce que je souhaite être toujours aussi présente dans une famille qui compte trois enfants et mon conjoint, également ingénieur civil, confie Geneviève Campeau. Je dois être organisée, bien poser mes priorités… et puis tout est possible ! »

Dès sa jeunesse, Geneviève Campeau s’intéressait à la construction, et son premier emploi à 16 ans fut de travailler comme manœuvre sur un chantier domiciliaire. Au sortir du cégep, même si les perspectives d’emploi étaient faibles dans ce domaine, c’est en génie civil qu’elle s’est orientée. Après son baccalauréat à l’Université de Sherbrooke, elle décroche un emploi chez Dessau, au département du transport. « J’ai travaillé dans le domaine de la planification des transports, de la conception en génie routier, de la surveillance de travaux ; j’ai aussi fait de la coordination interdisciplinaire dans des projets internationaux. C’est ce qui m’a donné une vision multidisciplinaire », raconte-t-elle. Son employeur, ayant remarqué sa capacité à comprendre les multiples facettes d’un projet, lui propose en 2009 de gérer la mobilité entourant les travaux d’achèvement de l’autoroute 30.

Dès lors, les projets se sont enchainés : l’échangeur Turcot, le pont Samuel-De Champlain et maintenant le pont-tunnel LHL, chaque fois pour un employeur différent. Geneviève Campeau intègre la firme Intervia pour le projet du tunnel LHL, et elle a l’intention d’y rester. Elle s’emploie à constituer une équipe experte dans la gestion de la mobilité. « Pour les prochains projets, j’aurai une équipe d’Intervia qui pourra me suivre. » Former des jeunes ingénieurs et ingénieures à la gestion de la mobilité est d’ailleurs le legs qu’elle veut laisser, car, contrairement aux autres travaux d’ingénierie, les infrastructures temporaires qu’elle conçoit disparaissent avec l’achèvement des projets.

Geneviève Campeau, ing., est diplômée de l’Université de Sherbrooke. Elle possède plus de 20 années d’expérience dans le domaine du génie civil. L’ingénieure occupe actuellement le poste de directrice de projets spéciaux au sein d’Intervia et travaille en tant que chargée de discipline en maintien de la mobilité dans le cadre du projet de réfection du pont-tunnel Louis-Hippolyte-La Fontaine (LHL).

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