, , 12 décembre 2022

Repreneuriat : entreprendre autrement

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Le transfert ou la reprise d’entreprise représente une tendance notable qui offre plusieurs avantages, notamment celui de reprendre la balle au bond et de la lancer dans une direction correspondant à ses propres aspirations.

 


Cet article s’inscrit dans le dossier « Entrepreneuriat ».

Par Mélanie Larouche


Dans un contexte socioéco­nomique où le quart des entreprises québécoises sera visé par le repreneuriat au cours des prochaines années, de nombreuses occasions seront à saisir pour les nouvelles généra­tions d’ingénieurs et ingénieures.

« Se lancer en affaires en faisant l’acquisition d’une entreprise exis­tante ayant déjà son erre d’aller, qui génère des bénéfices et pour­suit une mission et une vision d’affaires concrètes, cela implique des valeurs tangibles : du matériel, des équipements, de l’immobilier, etc., mais aussi une réputation établie, une clientèle et un réseau de fournisseurs, des employées et employés fidèles et compétents dont plusieurs sont des éléments clés », explique Denis Ellefsen, conseiller pour le Centre de trans­fert d’entreprise du Québec (CTEQ) de la Montérégie.

Le repreneuriat, qu’est-ce que c’est?

Selon le CTEQ, le repreneuriat se définit comme étant « une phi­losophie économique et sociale, une volonté commune pour un repreneur et un cédant d’assurer la pérennité d’une entreprise (PME) viable par le transfert des pou­voirs, du leadership, des savoirs et de la propriété de celle-ci. Dans cette perspective, le cédant assure la transmission de son entreprise alors que le repreneur la reprend pour en assurer la pérennité par la création de valeur en harmonie avec l’histoire de l’entreprise et les tendances économiques, sociales, démographiques, territoriales, sectorielles, fiscales, financières et managériales existantes ».

« La définition du repreneuriat est assez large, mais concrètement, sur le terrain, cela dépasse de loin la simple transaction, indique Denis Ellefsen. La reprise d’entreprise comporte un point de vue humain. Oui, elle touche les aspects légaux, fiscaux et comptables, mais l’humain est au coeur du repreneuriat. La personne qui dirige une entreprise connaît souvent personnellement toutes ses employées et tous ses employés, et certains depuis longtemps. La vente de l’entreprise peut alors générer des questionnements, des craintes, de l’incertitude. Pour que les choses se passent bien, l’entrepreneur cédant doit être bien accompagné et guidé par de bonnes ressources, pour faire les choses dans les règles de l’art. »

 

Une réelle tendance

Selon l’étude récemment menée par l’Ordre L’entreprenariat en génie au Québec et son écosystème (voir les faits saillants aux pages 38 et 39), le transfert d’entreprises est l’une des quatre grandes tendances à surveiller au cours des prochaines années dans le domaine de l’entrepreneuriat en génie.

Un contexte favorable

Près de 37 000 propriétaires de PME québécoises envisagent actuellement de transférer leur entreprise à très court terme. « Les faits saillants de cette étude révèlent que, en étendant l’analyse sur un horizon de cinq ans, une entreprise québécoise sur quatre sera concernée par le repreneuriat au cours des prochaines années, mentionne Denis Ellefsen. Il semble que les entrepreneures et entrepreneurs en génie sont particulièrement bien placés pour tirer profit du repreneuriat, puisqu’ils sont réputés avoir plus d’aversion pour le risque que les propriétaires d’entreprises en général et être plus prudents dans leurs calculs et leurs actions. Dans ce contexte, la reprise d’entreprise, particulièrement si celle-ci est déjà rentable, s’avère une bonne façon de se lancer en affaires. »

Denis Ellefsen affirme que c’est le contexte de l’arrivée massive des baby-boomers à la retraite qui crée une situation particulièrement favorable au repreneuriat. « Il y a de plus en plus d’entreprises à vendre ou qui le seront bientôt ; ce constat suit la pyramide des âges des propriétaires d’entreprises, laquelle indique qu’ils ont majoritairement entre 55 et 70 ans, note ce dernier. Il faut savoir que pour un individu qui souhaite céder son entreprise, le processus de transfert prend en moyenne de 5 à 7 ans. Le cheminement peut parfois être long… L’entrepreneur ou l’entrepreneure commence par se demander à quel genre de personne il ou elle veut vendre, puis des discussions s’amorcent avec des candidates et candidats potentiels. Vient ensuite le processus de vérification et de documentation. Il faut aussi prévoir une période de transition et de transmission des connaissances. Le processus peut être ardu, surtout dans un contexte de relève familiale. »

L’un des principaux défis pour le cédant ou la cédante est de bien se préparer à vendre son entreprise. « Comme pour la vente d’une résidence, il faut la rendre le plus attrayante possible, par exemple établir clairement la structure organisationnelle, s’assurer que les employés sont bien informés et que l’entreprise est autonome, explique le conseiller. Le cédant ou la cédante doit préciser quelles sont ses conditions ; il ou elle doit parfois se mettre à la recherche de personnel pour remplacer d’éventuels départs. Lorsque la préparation est bien faite, on avance rondement, de manière organisée et efficace. »

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Il semble que les entrepreneures et entrepreneurs en génie sont particulièrement bien placés pour tirer profit du repreneuriat, puisqu’ils sont réputés avoir plus d’aversion pour le risque que les propriétaires d’entreprises en général.

Denis Ellefsen — Centre de transfert d’entreprise du Québec

Le repreneuriat collectif

On parle de repreneuriat collectif lorsque des employés et employées s’unissent, parfois avec la personne qui les emploie, et forment une coopérative pour racheter l’entreprise. Tous deviennent des associés minoritaires, à parts égales ou non. « Dans certaines situations, on peut même voir des gens de l’externe créer une coopérative, comme dans le cas d’un dépanneur en Gaspésie où des clients se sont unis pour racheter l’entreprise », signale Denis Ellefsen.

Selon le conseiller, le repreneuriat collectif n’est pas nécessairement plus complexe, le groupe étant représenté par une seule personne. « On voit apparaitre la forme coopérative dans plusieurs firmes de génie-conseil, souligne-t-il. L’approche coopérative donne accès à l’actionnariat à plus de personnes. Par leur implication directe, les gens sont très motivés à assurer le succès de l’entreprise. Dans le contexte de rareté de main-d’oeuvre que l’on connaît, attacher ainsi le personnel à l’entreprise permet de stimuler leur engagement, ce qui est fort souhaitable. »

Par définition, la coopérative doit réinvestir ses bénéfices, et il est possible de le faire de diverses façons, notamment par l’acquisition de services complémentaires dans le but d’aller chercher de plus gros projets et d’étendre les marchés potentiels. « Le repreneuriat collectif est en croissance. Nous allons voir émerger de plus en plus de coopératives de professionnels, professionnelles, expertes et experts ; ceux-ci pourront réinvestir de manière à redonner à la communauté, entre autres en adoptant des façons de faire qui préservent l’environnement. Cette tendance va créer des régions plus fortes. Pour les jeunes ingénieures et ingénieurs souhaitant acquérir une entreprise, le repreneuriat collectif est une avenue très intéressante à envisager. »

Centre de transfert d’entreprise du Québec
Accompagner le passage du flambeau

C’est la volonté d’assurer la pérennité des entreprises québécoises sur la base d’une vision axée sur le repreneuriat qui a donné naissance il y a sept ans au Centre de transfert d’entreprise du Québec (CTEQ), qui coordonne aujourd’hui le travail de près d’une vingtaine de conseillères et conseillers régionaux et sectoriels. Ses valeurs très fortes de professionnalisme, de collaboration, de neutralité, de leadership et d’avant-gardisme font du CTEQ une organisation performante, reconnue pour ses nombreux accompagnements couronnés de succès.

Des services-conseils

« Le CTEQ agit de façon neutre et confidentielle, souligne le conseiller en transfert d’entreprise Denis Ellefsen. C’est un organisme à but non lucratif financé par le ministère de l’Économie et de l’Innovation du Québec. De ce fait, c’est un service financé en partie par les taxes et les impôts payés par les contribuables. Chaque année, ses conseillères et conseillers chevronnés accompagnent les cédants ou les repreneurs tout au long du processus de transfert d’entreprise. Ils et elles les guident, leur expliquent les différentes étapes à traverser, les dirigent sans aucun parti pris vers les experts et expertes dont ils auront besoin. »

En savoir plus

Lire la revue Plan novembre-décembre 2022

Lire l’étude l’entrepreneuriat en génie au Québec et son écosystème

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